Nous arrivons aujourd’hui au stade des films “passables”, c’est-à-dire ceux qui se regardent comme un pur divertissement et s’oublient aussitôt. J’aime autant vous dire que cela constitue les trois quarts des productions passées et actuelles (Prince of Persia, Max Payne, Hitman, Lara Croft, etc.)
L’avantage par rapport aux films nullissimes, c’est que l’on ne prend plus peur de mourir d’ennui: on laisse son cerveau au vestiaire et on entre de plain-pied dans l’action. Les défauts des films, insupportables dans la catégorie “Flop”, sont compensés ici par le souci de proposer un spectacle de qualité. Le Top des films “passables” est nettement représentatif de l’oeuvre de Paul W.S. Anderson, qui réalise Mortal Kombat, scénarise et réalise Resident Evil et produit Dead or Alive.
Mortal Kombat
Film réalisé par Paul W.S. Anderson, sorti en 1995
Le pitch
Le dieu des éclairs Rayden (Christophe Lambert) entraîne au combat ses poulains Liu Kang (Robin Shou), Johnny Cage et Sonya Blade en vue d’affronter le Boss final d’un tournoi d’arts martiaux: le sorcier Shang Tsung. L’enjeu du tournoi est bien entendu de sauver le monde des griffes des méchants.
Note finale : 4/10
L’avènement de la digitalisation (intégrer des acteurs filmés dans un jeu) crée un pont inédit entre cinéma et jeu vidéo. Les studios de jeux vidéo rêvent de mettre en scène les stars des films d’action. Hélas, les sommes exigées par Arnold Schwarzenegger (Terminator) ou Sylvester Stallone (Rambo) sont inaccessibles pour un petit studio comme Midway. Le jeune studio américain s’intéresse alors de près à une étoile montante: Jean-Claude Van Damme. Ancien karatéka et champion d’Europe de full-contact, immigré aux États-Unis en vue de faire carrière à Hollywood, l’athlète belge est propulsé sur le devant de la scène en 1988 avec le film Bloodsport (12 millions de recettes pour un budget de 1,5 million de dollars
). Mais JCVD s’avère être une étoile filante trop gourmande (il exige par la suite 75 000 dollars par film, soit le triple de son salaire sur Bloodsport). Si bien que pour éviter d’annuler le projet, Midway fait rentrer JCVD de force dans son jeu de baston Mortal Kombat. Midway reproduit fidèlement ses aptitudes de combat tirées du film Bloodsport, tels le célèbre coup de pied sauté ou le grand écart suivi d’un coup de poing dans les testicules. Le personnage qu’il incarne dans le jeu est un acteur de films d’action en quête de reconnaissance, à l’image (au sens propre comme au figuré) de JCVD! Et pourtant JCVD n’a pas touché un centime, car Midway a juste changé son nom en JC (Johnny Cage).En 1995, Midway talonne Capcom et son Street Fighter avec le film réalisé par Paul W.S. Anderson. Ce dernier va se spécialiser dans les adaptations de jeux vidéo en films: Alien vs. Predator (2004), les quatre Resident Evil plus le prochain Resident Evil: Retribution (2012), Death Race 1 (2008) et 2 (2011), une libre adaptation de Dead Space nommée Pandorum (2009) et enfin Dead or Alive (2007), en qualité de producteur. Le casting de Mortal Kombat comprend une inévitable star internationale pour faire face à JCVD dans Street Fighter: Christophe Lambert. C’est Brandon Lee qui devait incarner Johnny Cage à l’origine, mais l’acteur s’est tué sur le plateau de The Crow juste avant le tournage en mars 1993.
Le résultat final respire la fidélité au jeu. Trop parfois, avec les mêmes accoutrements “Power Ranger” version SM et la bande-son orientée techno/métal, qui martèle les neurones et préfigure celle de Matrix (avec beaucoup moins de subtilité tout de même.) L’astucieux réalisateur remplace les Fatality du jeu par une débauche d’effets spéciaux, si bien que le film ne comprend presque pas de sang et parvient à séduire en masse les adolescents par son côté High Tech. Le film sera un succès impressionnant : doté d’un budget d’à peine 20 millions de dollars, il en rapporte plus de 122 millions.
Resident Evil
Film réalisé par Paul W.S. Anderson, sorti en 2002
Lire l’article complet écrit à ce sujet: Resident Evil
Comment expliquer la multiplication des films Resident Evil ces dernières années? Par leur succès au Box-office: Resident Evil (33 millions de production/102 millions de recettes en 2002) / Resident Evil: Apocalypse (45 millions de production/130 millions de recettes en 2004) / Resident Evil: Extinction (45 millions de production/148 millions de recettes en 2007) / Resident Evil: Afterlife (60 millions de production/300 millions de recettes en 2010). C’est ce qui s’appelle un incroyable succès pour des films jugés “passables”.
Dead or Alive
Film realisé par Corey Yuen, sorti en 2007
Le pitch
Quatre “bimbos”, Christie, Tina, Kasumi et Helena, s’affrontent lors d’une compétition d’arts martiaux. Elles finissent par s’allier pour lutter contre un fou qui veut contrôler le monde. Tina est superstar dans le milieu de la lutte féminine, Christie est tueuse à gages, la princesse Kasumi est éduquée par des maîtres en arts martiaux, et Helena est une athlète en sports extrêmes. Elles forment un groupe dans l’esprit “Charlie’s Angels” (Drôles de dames).
Note finale : 6/10
Le jeu de baston Dead or Alive a longtemps été synonyme “d’érotisme soft” là où les Virtua Fighter, Tekken et autre Soulcalibur ne proposaient que de la “virilité hardcore”. En effet, les graphistes ont tout donné dans les textures, les animations et l’inertie des triples bonnets des combattantes dans l’action. Jamais un jeu vidéo n’avait proposé des seins aussi désirables. Encore mieux: les otakus guettaient l’apparition furtive des petites culottes sous les jupes à chaque coup de pied ou prise au corps à corps suggestive. Plus vicelard, le studio Tecmo a été jusqu’à développer un Dead or Alive sans combat ni personnage masculin ! Dans Dead or Alive Xtreme Beach Volleyball et sa suite sur Xbox 360, les combattantes se retrouvent en vacances sur une plage paradisiaque. L’otaku émerveillé n’a rien d’autre à faire qu’à admirer les créatures de rêve s’ébattre dans des activités hautement intellectuelles telles que la « Bataille de popotins », « Toboggan aquatique », « Beach Volley » et surtout « Saute piscine », où les héroïnes font remuer leurs énormes poitrines dans tous les sens à chaque bond. Une sorte de Sims contemplatif pour prépubères, en somme.
Avec un tel passif, le film joue bien entendu la carte de la surenchère et de l’autodérision, ce qui n’est pas le cas des films Tekken (2010) et The King of Fighters (2010), également inspirés de jeux de baston. Ces derniers se prennent bien trop au sérieux et s’avèrent insipides et soporifiques. L’adaptation de Dead or Alive au cinéma est l’occasion de donner un corps en chair et en os aux héroïnes polygonées et fantasmées. Quel plaisir de voir Jaime Pressly dans le rôle de Tina Armstrong, elle qui m’avait tant fait rire dans l’inénarrable série My Name Is Earl. On retrouve également Devon Aoki dans le rôle de la princesse Kasumi, elle qui jouait auparavant Miho dans Sin City (2004) de Robert Rodriguez. Les personnages sont fidèles au jeu vidéo et l’on reconnait sans mal les filles et les gars: Zack, Leon, Hayate, Bass, Bayman, et bien sûr Ryu Hayabusa. En plus de la cohérence, les combats sont habilement chorégraphiés et fun, sans jamais être trop violents ni trop sexuels pour ne pas se couper du grand public. Il faut dire que le réalisateur Corey Yuen avait coréalisé Le Transporteur avec Louis Leterrier, et que cela fait une trentaine d’années qu’il produit des films d’arts martiaux. Fidèle au jeu, Corey Yuen trouve à chaque fois l’angle de caméra qui donne au spectateur la meilleure perspective sur le soutien-gorge ou l’entrejambe des combattantes!
Qu’importe les carences criantes du film et son mauvais goût : sa propension à provoquer l’hilarité l’emporte au final. Dead or Alive fut malgré tout un bel échec au cinéma. Paul W.S. Anderson, qui a produit le film à hauteur de 21 millions de dollars, a dû s’en mordre les doigts puisqu’il n’en a rapporté que 7 millions.
Rédacteur en chef du Vortex. Amateur de Pop-Corn.
Créateur de singularités.